
Ce n'est qu'aujourd'hui que je me suis attaqué aux cartons alignés dans le couloir d'entrée et qui contenaient toutes les photos encadrées, lithographies, peintures, dessins, affiches, collages... Et c'est une joie que de revoir chaque œuvre, me remémorer son auteur quand je le connais, les circonstances de l'acquisition (achat, don, cadeau pour telle ou telle occasion). Ce que j'appelle l'œuvre au noir de Patrice Salsa, c'était un cadeau de l'auteur et néanmoins ami, pour mes 48 ans où j'avais fait une grande fête dans l'île de Migneaux à Poissy chez mes amis Marc Uguen et Gérard Marot. Les photos de musiciens de jazz de Jean-Marc Birraux, c'est lui qui me les a offertes à la fin de l'exposition que j'avais organisée à la Discothèque des Halles à Paris. J'ai une gravure sur linoleum dédicacée par Marion Brown en 1990 que j'allais souvent écouter au théâtre Dunois mais je ne me souviens plus des circonstances. La peinture de Nicolas d'Hautefeuille, je la lui ai achetée à son domicile à Bordeaux quand j'ai fait sa connaissance par l'intermédiaire de son cousin Antoine. J'ai aussi une bannière (toile peinte non tendue) d'Yves Olry que j'ai dû acquérir à la fin des années 70 quand j'habitais Givors. Je n'ai pas encore déballé toutes les affiches mais l'une de mes préférées qui est contrecollée sur bois est l'affiche de la Dispute de Marivaux mise en scène de Patrice Chéreau au TNP de Villeurbanne. Quand je vois cette affiche, je revois la pièce, j'entends la musique de Mozart qui servait de musique de scène. Je vais aussi apprendre à vivre avec les œuvres les plus récentes offertes pour mon départ en retraite.
En une matinée, je n'ai pas eu le temps de tout accrocher, mais j'ai choisi les emplacements de chaque œuvre et je ressens beaucoup d'émotions à la vue de chacune d'entre elles. L'aspect de mon appartement est déjà complètement changé. Les grands murs tout blanc disparaissent ou font ressortir les taches de couleur, soulignent les gris et les noirs. Je remarque que j'ai peu d'œuvres très colorées, il y a beaucoup de noir et blanc, ce qui est banal pour la photographie, mais aussi beaucoup de gris et de noir dans les estampes.
Et je ne comprends pas comment j'ai pu vivre sans la présence quotidienne de l'art. Ceci est tare.